DISCOURS DE POLITIQUE GENERALE DU PREMIER MINISTRE : Du bon et du moins bon pour l’hôpital public, ses soignants et ses praticiens hospitaliers

1er février 2024 par APH


CP APH 1er Février 2024 - Discours PM

APH a écouté le discours de politique générale du Premier Ministre. Au-delà du classique hommage du politique aux soignants, et en tire plusieurs points concernant l’hôpital public et les praticiens hospitaliers : réforme de l’AME, correction de la démographie médicale, santé mentale, permanence des soins, situation de l’Outre-Mer.

La réforme annoncée de l’aide médicale d’Etat continue de nous interroger. En tout état de cause, cette réforme ne devra ni s’opposer au serment d’Hippocrate que prononcent tous les médecins, ni à la nécessaire prise en charge médicale de chaque personne habitant sur le territoire, en termes de prévention, de suivi et de prise en charge dans le cadre de l’urgence : tout manque de prévention, toute insuffisance ou retard de prise en charge d’un patient a des effets sur la santé collective et des conséquences économiques non négligeables. APH sera vigilante sur la conduite du projet de réforme.

Les mesures de correction de la démographie médicale relèvent davantage du « yakafokon » que de mesures pertinentes et efficaces de manière pérenne.

  • D’une part, la nomination d’un émissaire pour aller chercher des médecins étrangers est un non-sens : c’est un pillage des ressources dans des pays dont l’état sanitaire est souvent pire que le nôtre, et c’est une négation de la formation médicale assurée en France. Qui n’a pas dans sa famille, dans ses amis, connaissance de jeunes étudiants qui ont dû quitter les études médicales à cause d’un numerus clausus pour s’orienter vers d’autres secteurs professionnels… alors que dès la fin des années 2000, les médecins alertaient sur le risque majeur de pénurie médicale ? Pourquoi ne pas ouvrir les vannes à une formation de qualité, la nôtre, en permettant l’accès aux études médicales bien plus large, en étendant les terrains de stages bien au-delà du CHU vers l’ensemble des modes d’exercice de la médecine, plutôt que d’aller chercher ailleurs une main d’œuvre dont il faut réévaluer la compétence, voire compléter la formation pour maintenir la qualité et la sécurité des soins pour l’ensemble de nos concitoyens ?
  • D’autre part, l’annonce de passerelles (avec l’exemple de la reprise d’études médicales pour les infirmiers anesthésistes) est, une nouvelle fois, l’annonce d’un dispositif qui existe déjà, auquel nous sommes favorables, mais qui, malheureusement, ne fonctionne pas.

Au lieu d’une « poudre de perlimpinpin », c’est d’une vraie réforme de l’accès aux études médicales pour nos étudiants dont nous avons besoin !

Le sujet de la santé mentale est évoqué, mais totalement effleuré… Combien de malades en attente de soins dans un système exsangue à force de fermetures de lits, de contraintes multipliées et de financements redistribués partout ailleurs que dans les hôpitaux publics et les centres médico-psychologiques (CMP) ? APH demande des mesures concrètes pour la psychiatrie publique !

Le Premier Ministre réagite le serpent de mer de la permanence des soins des médecins libéraux. La permanence des soins est le grand sujet que le Ségur a volontairement oublié de traiter et que nous avons mis beaucoup de temps à rouvrir. Cet axe est actuellement à l’étude, quasi essentiellement sur le sujet financier, qui ne prend pas en compte ni le déséquilibre total entre l’engagement des médecins hospitaliers et libéraux, ni la pénibilité de cette mission, contrairement aux engagements du Président de la République dans ses vœux aux professionnels de santé le 6 janvier 2023. APH demande que ce chantier soit ouvert « en grand », de manière ambitieuse, associant les deux composantes du système de santé : le public et le privé en analysant les besoins de soins de la population. Un « Varenne de la permanence médicale des soins » est désormais indispensable pour remédier au problème de l’accès aux soins urgents.

Enfin, le Premier Ministre évoque l’Outre-Mer. La situation sanitaire dans certains territoires d’Outre-Mer est indigne. APH vient d’être interpellée par la situation du CHU de Martinique, où, comme à l’époque de la crise sanitaire, « on manque de tout pour soigner nos malades : compresses, couches, toits étanches, locaux salubres, médicaments, dispositifs implantables et chirurgicaux, fils électriques ou Ethernet, infirmières au lit du malade ». APH exige que l’ensemble des établissements de santé d’Outre-Mer reçoive le financement ad hoc de l’Etat pour avoir des structures équivalentes aux structures métropolitaine !

Mais… toujours rien sur l’attractivité des carrières médicales hospitalières. Rien pour fidéliser les médecins à l’hôpital, rien pour corriger les erreurs des Ségur vers les praticiens hospitaliers. Toujours rien sur le temps de travail, la pénibilité, les retraites en particulier celle des hospitalo-universitaires qui depujs 1958 se voient spoliés de leurs droits sur leur engament clinique dans les CHU… Toujours rien sur l’ONDAM hospitalier pourtant sous-doté de 20 milliards par an…

… et toujours pas de Ministre délégué chargé spécifiquement de la Santé et de la Prévention !

Action Praticiens Hôpital et ses composantes syndicales ont des propositions concrètes à remettre au Premier Ministre. Nous savons qu’elles seront efficaces, car ce sont les attentes du terrain. Action Praticiens Hôpital, qui rencontre prochainement la Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, demande également à rencontrer le Premier Ministre pour échanger sur ces propositions « clé en main » qui permettront de contribuer à redresser l’hôpital public.

Pour Action Praticiens Hôpital il devient urgent de lancer un Plan santé global intégrant entre autres l’état des lieux des besoins de la population, le principe des ratios voté au Sénat dans la proposition parlementaire de loi du sénateur Bernard Jomier, le juste financement de l’hôpital public et la modélisation du financement de la santé en analysant les impacts médico-économiques d’un juste soin pour tous et pas seulement les coûts salariaux, l’accès aux soins dans les territoires de santé en insistant sur les besoins spécifiques des Outre-Mer, la formation des étudiants en santé, l’enseignement, la recherche, l’attractivité des carrières hospitalières et hospitalo-universitaires, le financement de la formation continue des praticiens, l’écologie en santé et la santé publique, l’éthique, les conditions d’exercice, la gouvernance, la pénibilité et les retraites, le dialogue social, la place des corps intermédiaires…et la Prévention avec la promotion d’une éducation en santé pour tous nos concitoyens dès le plus jeune âge pour ancrer des éléments essentiels de connaissance en incluant l’activité physique.